La fin de la mondialisation a détruit le freelancing


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    2020 est une année particulière, c’est une année de folie médicale, des pires abus et de l’idiotie humaine et élitaire dans toute sa splendeur. Mais 2020 a également signifié la fin de la mondialisation de manière définitive. Le processus était en cours dès 2019 où on apercevait déjà les fractures de la mondialisation, mais 2020 a permis de la faire passer pour un accident de parcours lié au covid alors que c’était déjà écrit.

    La fin de la mondialisation amène aussi la fin du freelancing hors sol. Le Freelancing est le batard de la mondialisation. Des clients et leurs prestataires peuvent être à l’autre bout du monde, mais les deux peuvent travailler avec des paiements sans frontière, des salaires les plus bas possibles, car vous trouverez toujours moins cher à condition de chercher la mauvaise qualité possible.

    Cette fin du freelancing, je l’ai vécu à partir de 2019. Je suis freelance dans la rédaction web depuis plus d’une décennie, car j’ai commencé mes premières armes sur Fiverr, puis sur Odesk en 2009. A cette époque, le freelancing était florissant et les clients étaient prêts à payer le prix fort. Odesk fusionnera ensuite avec Elance pour devenir Upwork, la poubelle du freelancing qui va dominer le marché mondial pendant les 10 prochaines années. Dans la fusion, on eu l’équivalent de Gogeta, mais en mode flatulence.

    On a eu les spammeurs et ceux qui cherchent le moins cher possible, des trous du cul tandis que les bons clients sont partis. J’ai eu la chance de travailler avec l’un d’entre eux dans le secteur des VPN. Il gagnait sa vie avec plusieurs sites de VPN par l’affiliation et moi, je lui fournissais du contenu. On a commencé vraiment à travailler régulièrement à partir de 2012 et cela s’est terminé en 2020 même si les signes d’abandon étaient présents dès 2019.

    Qu’est-ce qui s’est passé ? D’une part, le web s’est considérablement appauvri durant la dernière décennie. Il s’est fait parasiter par quelques grosses entreprises qui ont pu imposer un Trust abominable en décapitant les prix vers le bas. Ensuite, on a eu l’avènement de la vidéo, des lives et d’autres contenus, atypiques du web classique. Moi qui était spécialisé dans le texte, autant dire qu’on s’est fait ratatiner.

    Mais ce n’est pas la seule raison. Après 7 ans à travailler ensemble, j’ai eu une dernière discussion avec mon client où il m’a dit que le travail à distance, c’était mort pour lui. Il avait bourlingué à droite et à gauche, d’abord en Allemagne, ensuite à Malte et finalement au Portugal (vu ses destinations, on peut imaginer ce qui l’attirait dans ces pays). Il ne voulait plus faire du télétravail pur, mais avoir des équipes physiques qu’il pourrait surveiller et leur botter le cul si c’est nécessaire.

    Honnêtement, même si cela signifie que j’étais désormais chomeur allant sur mes 40 ans, je ne peux pas le blamer. Il a raison, le travail local est ce qui est mieux et cela suit cette fin progressive de la mondialisation. Dans le freelancing, l’isolement était aussi une vraie saloperie.

    L’organisation est totalement éclatée où chaque reste dans sa bulle. A la fin de la journée, vous avez des parties fractionnées de la tâche et le résultat final est souvent une grosse merde. De plus, l’esprit bureaucratique a tendance à revenir assez rapidement et donc, chacun se tire la couverture et vous avez plein de réunions, de cochage de tâches dans des services à la mords-moi le noeud, inutiles et vous avez en bas d’une pyramide inversée, un ou deux mecs (en l’occurence moi), qui faisaient tout le boulot.

    2020 n’a fait qu’accélérer le processus puisque désormais, on a arrêté les hommes pour sauver l’économie ! Et les génies de la débilité, à l’origine des confinements mortifères, ont pensé que la mondialisation est un scooter, qu’un coup de pédale et ça redémarre. Mais le nouveau départ n’a jamais eu lieu.

    Tout le monde s’accorde à le dire, le monde post-2020 est plus médiocre. Rien ne marche réellement, les services postaux sont dans la mouise, la logistique n’est jamais repartie, les flux financiers sont à l’arrêt, la mondialisation s’est grippée définitivement. Et comme les freelances sont les rouages esclavagisés de la mondialisation, il est normal qu’ils se fassent aussi décapiter.

    Après, je parle du freelance par mon prisme, celui de la rédaction web, de quelques travaux visuels, de gestion de CMS, etc. Mais c’est un terme qui peut désigner un avocat comme un ingénieur. En relayant un rapport sur les Freelancers de Payoneer il y a quelques années, j’avais dis que les ingénieurs et les avocats avaient le salaire-horaire le plus élevé des freelances, mais c’était aussi les plus mécontents.

    C’est normal, ils n’ont pas fait 5 à 10 ans d’études, coutant la peau des fesses et des nichons, pour avoir le même salaire qu’un rédacteur web ou qu’un Community Manager ! Ben ouais, c’est la beauté meurtrière du freelancing. Dans ce rapport, le rédacteur web sans diplome avait un salaire de 20 dollars par heure (calculé très à la hausse à mon avis) et celui de l’ingénieur était de 26 dollars. 6 dollars de différence entre un ingénieur et un scribouillard comme moi, le freelancing, comme je le dis souvent, c’est 30 petits boulots par mois et à chaque fois, vous êtes un débutant.

    En plus de la fin de la mondialisation, on a eu la récession qui a frappé tout l’Occident à partir de 2021. Et on en ressent les effets tranchants en 2023. Tout est littéralement à l’arrêt, comme je suis dans le spectre large du web, je vois que les revenus pubs sont à la baisse, l’affiliation est inexistante et les sponsos sont aussi rachitiques que le génie économique de Bruno, le renouveau ! Tout est à l’arrêt et tout est grippé et cela va empirer à l’avenir.

    En Occident, l’Europe va surtout le payer très cher dans les prochaines années. Sa monnaie ne vaut plus rien et comme le Freelancing, que je connais, concerne surtout des clients européens avec des prestataires malgaches, ivoiriens, maghrébins, etc, alors il est évident que si les clients sont ruinés, leurs sous-traitants le sont aussi. Et cela donne lieu à d’autres joyeusetés du marketing web avec les arnaques en tout genre sur les formations moisies qu’on doit acheter pour trouver un boulot d’esclave.

    Cependant, je pense que le freelancing en tant que tel, n’est pas totalement mort. Il doit muter et chaque pays doit développer sa propre offre et demande pour que les clients et les prestataires officient dans le même pays. Cela résoudrait tous les problèmes du freelancing actuel que ce soit les paiements, les prospections ou la recherche d’emploi.

    Le problème est le suivant, le Freelancing a biberonné l’Occident à des prestations les moins chères possibles et il est devenu accro. Donc, de la même façon qu’un junkie continue de s’injecter sa merde en sachant qu’il va y laisser sa peau, le client et le prestataire sont dans une sorte de danse macabre où chacun se dévalorise pour perpétuer le système.

    Le mot de la fin est que le Freelancing de la mondialisation n’a pas encore terminé sa phase de putréfaction. Il y aura encore quelques soubresauts ici et là, mais il faut qu’il mute radicalement pour refléter les nouveaux mondes qui arrivent, des mondes formant des blocs souverains avec des intérêts antagonistes de part et d’autre. L’autre problème est que dans l’un des nouveaux mondes possède déjà ses propres freelances et qu’il peut se suffire à lui-même et donc, les prestataires dans les pays pauvres deviennent inutiles.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur web depuis 2009 et webmestre depuis 2011. Je suis également un blogueur dans la vulgarisation scientifique et la culture.

    Je m'intéresse à tous les sujets comme la politique, la culture, la géopolitique, l'économie ou la technologie. Toute information permettant d'éclairer mon esprit et donc, le vôtre, dans un monde obscur et à la dérive. Je suis l'auteur de deux livres "Le Basilic de Roko" et "Le Déclin".

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