Est-ce que Parasite mérite sa palme ?
A part le fait qu’un coréen obtienne une palme, est-ce que son Parasite est-il vraiment digne d’éloges ou une critique rabâchée sans aucune originalité.

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Quand on voit la quantité astronomique de prix remporté par Parasite, on se dit que c’est un chef d’oeuvre. Mais après les 132 minutes, mes sourcils font un V en me disant que j’ai raté quelque chose. La Palme d’Or est censé récompenser le meilleur film, par son propos, sa réalisation, sa mise en scène. En bref, après avoir vu un film palmé, on est accroché aux boyaux et on commence à sentir des choses dans ses fondements, qui vont parfois tâcher les sous-vêtements. Parasite est un bon film, bien maitrisé avec un bon équilibre, mais il n’apporte rien de nouveau sous le soleil capitaliste.
Rester à sa place
Chaque réalisateur a ses gimmicks et ceux de Bong Joon-ho s’inspirent de la lutte des classes, du capitalisme et de l’humour d’un ivrogne dans un bar. Vous mélangez ça dans une caméra et vous obtenez des films assez fantastiques comme le Transperceneige qui m’a beaucoup marqué et The Host. Okja était beaucoup plus mitigé, car je hais cordialement les végétaliens. Et avec Parasite, on retrouve toute la mécanique de Bong Joon-ho, mais qui manque cruellement de substance.
L’expression Rester à sa place semble avoir marqué ce réalisateur, car il est dans l’une des scènes les plus marquants du Transperceneige (le soulier, bande d’incultes, le soulier) et il revient plusieurs fois dans Parasite. Ce film met en scène, deux mondes totalement différents, mais avec les mêmes bêtes sauvages qu’on connait comme êtres humains dans nos contrées. Un monde très pauvre et une famille miséreuse à l’extrême. Le père, la mère, le garçon et la fille.
De l’autre coté, nous avons une famille, blindée de thunes, le père, la mère, le fils et la fille. Cette éloge de la symétrie entre les personnages revient souvent dans les films de Joon-ho. L’inégalité sociale est littéralement physique puisque les pauvres vivent littéralement dans une espèce de cave tandis que les riches vivent dans une maison ultra-surélevée dans un quartier de la haute. Mais cette différence physique ne s’arrête pas là .
Survivre à tout prix comme un Parasite
Les films sud-coréens sur la lutte des classes ne se posent pas de questions. Ils n’ont pas la même culture de la critique du capitalisme. Américanisés à l’extrême, leur identité s’effiloche avec le temps. En bref, un nouveau Marx ne risque pas de sortir des bas-fonds de Séoul et une réplique dans le film le confirme, Tout ce qui compte, c’est l’argent.
Ici, Joon-ho met un point littéralement pathologique dans la lutte des classes que les plus pauvres (et j’en fais partie) sont littéralement obsédés par l’argent. Toujours la même symétrie chez les riches, même si la famille pleine aux as dans Parasite, considère sa richesse comme un élément naturel de leur vie. Ils comprennent la puissance de l’argent, mais ils ont plus de distance. Leur caractéristique principale étant un racisme démesuré envers les pauvres. Le film Margin Call en est un exemple sublime où chaque personne, même les moins avides, sont obsédés par le fric.
Pas de pitié entre les pauvres
Cette famille de pauvre trouve une brèche pour s’infiltrer dans la famille riche. Un ami du fils, va à l’étranger pour ses études et il propose au rejeton de le remplacer comme professeur à la petite bourgeoise. L’ami le lui propose en toute sincérité, estimant que le fils est quelqu’un de bien. La scène est intéressante puisque le fils ne laisse rien paraitre de sa vraie nature. Il arrive à se faire embaucher et petit à petit, le fils va faire embaucher toute la famille. La fille va devenir une experte en beaux-arts. Le père va devenir le chauffeur et la mère sera la gouvernante.
Et ils vont le faire en évinçant les employés existants. Les riches ont déjà une gouvernante et un chauffeur. Ils vont faire passer ce dernier comme un pervers et la gouvernante attrape la turberculose (un mouchoir imbibé de ketchup est suffisant pour berner ces crétins de riches). Ici, Joon-ho met en scène, de manière assez médiocre, que ce Clouscard considérait comme une conclusion du capitalisme de séduction.
Que les pauvres vont se battre en eux. Et c’est normal, car avec un capitalisme virulent, le pouvoir monétaire n’est plus à tout le monde. Et tout le monde, donc, se bat pour la moindre piécette qui tombe. Vous avez déjà vu sans doute un billet de quelqu’un qui tombe dans la rue et tout le monde se précipite, la pétasse en tailleur channel ou le SDF qui fume une clope dont le contenu est bien plus toxique que le Zyklon B.
Un souterrain bien familier
La famille des pauvres semble aux anges. Ils ont trouvé les meilleures places, une paye royale et de la bouffe de luxe à volonté. Toutefois, il n’y a rien de maléfique dans leurs intentions. C’est juste que c’est chacun pour soi et on est très loin de la solidarité fantasmée de la Cité de la Joie. Comme l’en témoigne le père dans une scène qui espère que le chauffeur évincé retrouvera une bonne place. Pas exactement.
Pendant une absence des riches, la mère pauvre trouve un genre de bunker secret où elle déniche la gouvernante et le chauffeur évincés. Les deux étaient ensembles et ils s’étaient réfugié dedans, car ils n’avaient nulle part où aller. Ce bunker n’est pas connu des riches, ce qui fait qu’ils sont tranquilles. S’ensuite un méli-mélo habituel où chaque pauvre tente de reprendre sa place en dénonçant les autres. L’image du Bunker et du souterrain est souvent utilisé dans l’inégalité sociale. Même si Parasite n’arrive même pas à la cheville du film Us par Jordan Peele et ses doubles dans leur souterrain. Finalement, la famille arrive à s’échapper et ligote les deux anciens employés. Je résume grossièrement, mais c’est ça.
Parasite propose une mise en scène, extrêmement bien léchée comme on l’avait vu avec le Transperceneige. Notamment où la famille arrive à s’enfuir et il pleut des torrents. Leur maison, dans la cave est totalement inondé. Et on a ce plan où l’ancienne gouvernante, dégueule dans la cuvette des toilettes du Bunker et que le père, dans sa propre maison, tente de contenir l’eau qui déborde des égouts de ses propres toilettes. Le parallèle est saisissant sur ce qu’un pauvre peut faire à un autre, sans le vouloir. L’ancienne gouvernante finit par mourir dans le bunker et disons que son compagnon apprécie moyennement cet état de fait.
Un final en eau de boudin
Le final de Parasite est assez quelconque et même assez décevante. La famille de pauvres arrive à arranger les choses et on a une fête, organisée par les riches. Là , l’ancien chauffeur arrive à se libérer du Bunker, prenant un couteau dans la cuisine, il commence à tailler dans le tas de la fête. Complètement devenu fou par la perte de sa compagne. Il finit par être tué, mais la fille pauvre meurt également. Et là , le père tue également le père riche.
Il faut voir la scène pour la comprendre. Mais ce qu’elle nous apprend est que même lorsque son propre fils est ensanglanté, un connard de riche sera toujours un raciste de la pire espèce envers les êtres qu’il considère comme inférieurs. Le père pauvre ne peut le supporter et boum, le poignard dans la poitrine du riche. Pour ne pas être arrêté, il va se réfugier dans le bunker où il va rester pendant des années. Jusqu’à ce que le fils pauvre, devienne suffisamment riche pour se payer la fameuse maison et libérer son père… de la pauvreté.
Et c’est là que Parasite manque cruellement sa cible. Beaucoup de critiques ont salué les scènes cocasses, mais désolé, je n’ai pas du tout rigolé devant le ridicule des pauvres (si vous l’avez fait, alors vous êtes dans l’autre camp). La critique du système, posée par Parasite est pâle comme un vampire transgenre. Parce qu’à la fin, la leçon est que “tu dois être premier de la classe, devenir un bon citoyen et payer tes impots comme tout le monde”.
Il faut que tu ais une bonne femme, deux mioches et ensuite, tout ira bien. Ce qui est encore plus étrange est que malgré les années, le père ou le fils n’ont pas pris une ride à la fin. Parasite est un bon film en somme, on passe un bon moment, mais ce n’est qu’un concept rabâché mille et une fois. Un navet comme Demolition Man avait plus de punch dans sa critique du système que ce film.